LE TRAMWAY DE LA PIEGE - 1e partie
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4e Edition |
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De Castelnaudary à Belpech
La petite histoire…
du Tramway des collines !
En ce début de XXIème siècle, crise économique aidant, les tramways s’installent dans nos centres villes. Mais saviez-vous qu’il y a cent ans, ils étaient déjà là ? Simplement temporairement détruit par l’essor économique du XXème siècle. A l'occasion du 80éme anniversaire de sa disparition, je vais vous conter ici l’histoire du petit tram qui de 1903 à 1933, de Castelnaudary à Belpech, a sillonné les collines de la Piège.
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Au début de 1900 l’Aude était économiquement un pays de vignes. La Piège à l’est du département l’alimentait en graines et fourrages.
« Les transports par charrettes y sont actuellement si onéreux, si longs et difficiles, que dans le canton de Belpech, au lieu d’envoyer les marchandises sur Castelnaudary, on préfère les transporter directement sur Mazères et Saverdun, dans le département de l’Ariège, pour les embarquer à destination de Narbonne. »
Ainsi les marchandises expédiées de Belpech transitaient par Toulouse avant de descendre sur Castelnaudary jusqu’aux régions viticoles par la voie du « Midi » effectuant un parcours Belpech-Castelnaudary estimé à 140 km !
Il devenait impératif d’implanter une ligne de tramway à travers les collines et les vallées de ce petit pays agricole isolé. Un « cordon ombilical » pour ramener vers Castelnaudary l’activité économique des deux cantons de Salles sur l’Hers et Belpech.
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Deux sénateurs audois influents, Adolphe Turrel par ailleurs ministre des travaux publics de 1896 à 98 et Armand Gauthier également président du Conseil Général de l’Aude, s’attelèrent à l’ouvrage.
Lorsque la Compagnie des Chemins de Fer du Midi livra à l’exploitation la ligne Bordeaux-Cette le 22 avril 1857, l’événement connut un succès retentissant.
Le Conseil Général de l’Aude se sentit très concerné par ce nouveau mode de transport et fit « greffer » sur la « transversale » du Midi de nombreuses voies normales à partir de Castelnaudary vers Castres, de Bram, de Carcassonne vers Quillan, Lézignan ou Narbonne. Mais de nombreux territoires restaient isolés. Un réseau complémentaire à voie étroite fut étudié dès 1880 pour relier tous les chefs-lieux de cantons de l’Aude.
Le Conseil Général concéda en 1889 la gestion de ce nouveau réseau à la Compagnie des Tramways de l’Aude (TVA).
Cette compagnie avait été créé le 7 novembre 1898 et avait son siège social à Carcassonne. Elle se substituait à un entrepreneur et détenteur de la concession, M. Hugues Bardol pour un réseau de tramways dans le département de l'Aude.
Elle avait adopté le sigle TVA sur le matériel roulant et seules les lettres TA y furent représentées.
C’est ainsi que 1901 à 1908 douze lignes furent ouvertes dans le département. Pour le Lauragais les lignes de Fanjeaux-Bram-St Denis et particulièrement ici Castelnaudary-Belpech. Ces deux lignes n’ayant pas subi de réaménagement au cours de leur existence, nous montrent bien la conception initiale du réseau. (1)
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Les bâtiments des stations construits d'une façon simple, étaient de trois types selon l'importance du trafic. Ils ne comportaient pas de logement du chef de gare.
La gare de Castelnaudary
Le projet des installations à réaliser pour la réception à Castelnaudary de la ligne de Belpech fut approuvé le 28 mars 1902. Après quelques dissensions qui finirent même au Conseil d’État, celui-ci débouta les partis le 30 janvier 1907 et obligea la Compagnie du Midi à accepter les modifications imposées à son réseau par l’implantation d’un passage à niveau.
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En effet la ligne de Belpech se développant vers le sud alors que la ville de Castelnaudary et sa gare du Midi se trouvait au nord de la grande ligne.
La voie des TVA devait donc la franchir, en faisant un angle de 114° avec la grande ligne (PN).
Un cul-de-sac de sécurité fut installé sur la voie des TVA côté nord, mais pas au sud.
Dès le départ de la gare, la ligne franchissait celle du Midi à environ 200m du départ.
Un disque ouvrait le passage quand il n’y avait pas de train. Ce qui était rare, les horaires ayant été coordonnés pour assurer les correspondances.
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A l’angle de la cour des voyageurs de la gare du Midi que la ligne des TVA traversait en diagonale, se trouvait un quai de 9 x 8,35 m et des lieux d’aisance séparés. De l’autre côté de la cour un terrain triangulaire servait de gare locale des marchandises avec deux voies en tiroir longeant la voie principale en une troisième s’en écartant avec un pont bascule ; elle était bordée par une halle de 12 m, un quai découvert de 16 m avec rampe de 6 m. Après la fermeture de la ligne, cette cour et la halle servirent de gare routière à la SGTD.
En 1911 un projet qui n’eut pas de suite, émanant du syndicat de la batellerie du Sud-Ouest, prévoyait de raccorder par un transport aérien le Grand Bassin du canal aux gares du Midi et de TVA.(1)
Ici arrivée de Belpech de la machine n°27 devant l'octroi.
Au fond le bureau voyageurs des TVA.
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En prévision de l’électrification de la ligne Toulouse-Sète, un pont routier de type « Bow-String » fut implanté plus à l’ouest. La voie des TVA fut immédiatement déviée par ce pont dès sa mise en service en mars 1922.
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Les rails semi-enterrés, ici devant les nouveaux silos, suivaient le côté droit de la route jusqu'à la gare de Cumies-Payra.
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Dès l’installation du pont, la partie de voie délaissée fut utilisé comme tiroir pendant un an puis les rails et l’appareil furent déposés et transférés à la gare de Cumies-Payra, seule gare de la partie de ligne avant Salles ayant un palier suffisamment long pour cette implantation. |
La gare de Belpech
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Belpech, l'autre tête de ligne, comprenait la voie principale, deux voies de manoeuvres et une voie de garage. Les bâtiments étaient composés d'une halle avec quai découvert et poste d'eau, d'un dépôt pour deux locomotives avec fosse à piquer et d'un atelier-magasin et dortoir.
Le terrain, le Bureau de Vente et la halle sont maintenant occupés par une coopérative, seul subsiste (à gauche) une partie du dépôt des locomotives .
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Les autres gares
Toutes les autres gares, à l'exception de celle de Salles sur l'Hers où une halle couvrait le quai de marchandises, étaient construites sur le même modèle.
Elles se composaient d'une voie unique, avec plaque tournante qui alimentait un quai marchandises de 6m x 9 et d'un abri voyageurs - bureau de vente de 6,59m x 4,08.
Ici, la gare de Pécharic et Le Py, positionnée au croisement des routes GC15 (N625) et GC102(D102), en vue du raccordement de la ligne à celle de Carcassonne - Belpech via Montréal et Fanjeaux, ligne qui ne fût jamais construite.
Cette gare légèrement aménagée sert aujourd'hui de station abribus à la commune de Plaigne, mais elle n'est pas la station tramway de Plaigne, située 1,100 km plus loin au pied du village.
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LE DETOURNEMENT DE SALLES/L'HERS |
En pointillé le tracé prévu |
Entrée du village par le GC19, à gauche la gare du TVA.
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Lorsque l’avant-projet fut connu des Salhersiens, au début de l’année 1897, ce fut une levée de boucliers ! La ligne venant de Montauriol, traversait le carrefour de Nadal, franchissait le coteau des Moulinières et à Saint Hubert virait à gauche vers Sainte Camelle en remontant la vallée du Jammas. La gare de Salles implantée à Saint-Hubert se trouvait de ce fait à 1800 mètres du centre de l’agglomération !
La réaction ne se fit pas attendre. Le Conseil Municipal vota à l’unanimité une protestation contre le tracé envisagé qui avait été établi sans consulter les communes riveraines. Une pétition recueillit plus de 180 signatures, sollicitant de reprendre le tracé. Les deux pièces furent transmises au sous-préfet de Castelnaudary avec copie au sénateur Eugène Mir et au député Marfan.
Le service des Ponts et Chaussés fut chargé d’une nouvelle étude. Sa conclusion fut que la déviation de Salles était impossible ou très longue à réaliser puisque le projet avait déjà été approuvé par le Conseil d’Etat et que les expropriations entre Montauriol et Saint Hubert étaient autorisées. La seule solution rapide fut pour la commune de Salles d’acheter à l’amiable et à sa charge tous les terrains nécessaires. Ce qui fut décidé par le conseil municipal du 12 août 1898.
Le Conseil Général adopta le 27 août suivant le tracé définitif : au carrefour de Nadal la ligne prenait à droite par le GC19 la vallée de l’Hers Mort jusqu’au village et rejoignait Saint Hubert par le chemin d’intérêt commun n°15 qui devait être élargi.
Les travaux se réalisèrent. La gare comprit un abri aux voyageurs, une remise pour une voiture, un quai découvert à marchandises, une voie de croisement, une voie de marchandises et un réservoir.
Le tronçon Castelnaudary-Salles sur l’Hers fut mis en service le 1er janvier 1903 et la section Salles-Belpech le 14 juin suivant. La municipalité de Belpech ayant demandé que cette ouverture se fît le dimanche de la fête locale (3).
On accorda un arrêt facultatif à Saint André et une halte à Saint Hubert. (2) |

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La voie d’un mètre entre boudins était équipée de rails Vignole posés sur traverses tous les 85 cm. Les rails étaient noyés à fleur de chaussée.
La ligne de Castelnaudary à Belpech avait une longueur chaînée de 40,571 km.
La ligne n’était qu’une succession de « montagnes russes » assorties de courbes brusques, surtout entre Villeneuve la Comptal et Montauriol, puis entre Peyrefitte sur l’Hers et Mayreville. Elle possédait en outre la particularité bien spécifique du plus important nombre de plaques tournantes des lignes du réseau, soit 10. Cette particularité peu enviable résultait de l’application à la lettre de l’article 11 du cahier des charges qui précisait que les gares seraient établies selon le type Sarthe et Loir et Cher, comportant au moins une plaque par station. Mais toutes gares de la ligne ne furent pas modifiées, parce que les terrains étaient généralement très exigus, et aussi parce que cette ligne resta toujours la plus déficitaire du réseau.
Dès le pont de Castelnaudary, la voie en accotement suivait le côté droit du GC19 (N624 aujourd'hui) jusqu’àl'arrêt facultatif de Ferrasse (Pk 2.902) suivi de la halte de Villeneuve la Comptal (Pk 3.604), jamais transformée en station malgré les vœux de la commune, après avoir desservi l’arrêt des Terrasses.
Commençait alors une longue succession de courbes et de déclivités, la ligne partant de l’altitude 164 mètres culminait à 293 mètres. Après quelques écarts pour limiter les courbes une déviation commençait après le Pk5 au champ de tir de Sainte Marguerite, pour éviter la rampe de la route que l’on retrouvait au Pk7. Avec au Pk 6 et 8 les arrêts facultatifs de Fontcontar et Bordeneuve.
On arrivait ensuite en gare de Cumies-Payra (Pk 10,342). L’appareil récupéré à Castelnaudary et la voie correspondante avaient été reposés parallèlement à la route entre celle-ci et la voie principale, l’aiguillage étant côté Castelnaudary.
La longueur du palier n’était que de 85 mètres.
Conservant le côté droit de la route et presque toujours en rails noyés, la ligne arrivait à Montauriol (Pk 12,037). Au Km 13, à l’arrêt de Nadal, la voie s’infléchissait pour emprunter, sur le côté gauche, le chemin IC 15 (D15), suivant la vallée de l’Hers. Avec un arrêt facultatif au lieu dit Saint-André. |
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Après avoir franchi le pont routier de 10 mètres sur l’Hers, la station de Salles sur l’Hers était établie au pied du village (Pk 16,935). En ce point commençait une petite déviation, avec pont métallique de 10 m sur le ruisseau de Jammas, pour rejoindre le côté gauche du GC 15 (N625)
remontant la vallée, passant aux haltes de Saint Hubert (Pk 18,726) et de Sainte Camelle (Pk 20,501) pour arriver à la station de Peyrefitte sur l’Hers (Pk 23,474) dont le village domine la route. |
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Peu après, franchissant une seconde fois sur les ponts routiers de 7,60 et de 3 mètres le ruisseau du Salet, la voie passe en déviation à droite sur un kilomètre au commencement de la dure rampe dont le sommet est marqué au col, par la station de Mayreville (Pk 26,562) ; le terrain, comme à Salles, est maintenant utilisé par l’Equipement.
Redescendant en pente douce dans la vallée du Py, toujours à droite en rails noyés, franchissant au passage le pont routier de 4 m sur le ruisseau de Teuilié, la ligne arrivait à Pech-Luna (Pk 28,538). Après les arrêts de Pesquiès et de Py, la voie tournait à droite au lieu-dit « La Remise » pour emprunter pendant quelques centaines de mètres le tronc commun des GC 15 et 102 ;
passant à gauche sur cette section la voie empruntait le pont routier de 11,50 m sur le ruisseau du Py et touchait la station de Pécharic et Le Py (Pk 32,537). |
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A la fin de ce tronc commun routier la voie tournait à gauche pour traverser la vallée sur le côté droit du GC 15 (D625) en utilisant le viaduc à trois arches de 30 mètres chacune sur la Vixiège, puis, tournant à droite par une courte déviation que suit maintenant la route, la ligne prenait le côté droit de l’IC 25 (D25), arrivait à Plaigne (Pk 33,655) au début d’une déviation rectiligne de 700 mètres sur laquelle le Bureau de Vente se trouve maintenant au milieu d’un champ.
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La machine n°27 en gare de Belpech |
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Sans grandes sinuosités, suivant la droite de la route retrouvée, dans la vallée de la Vixiège, la voie
desservait les haltes de Blazens (Pk 35,722) et de Tresmèzes (Pk 37,808)
au lieu-dit Peyrotte, près du chemin de Mazeau, la voie traversait la chaussée puis empruntait une déviation destinée à la protéger des inondations et, par une courte rampe, arrivait en gare de Belpech (Pk 40,542). (1) |

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