HISTOIRE DE LA REGION |
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LA DOCTRINE - La doctrine du catharisme avait quelques
points communs avec le christianisme, mais sa morale était tellement
sévére que seuls quelques initiés, les parfaits, pouvaient
la pratiquer. Le reste des croyants vivait à sa guise, recevant, en
cas de danger de mort, un sacrement, le "consolamentum", qui les
élevaient au rang de parfait. On ne pouvait le recevoir qu'une fois
et celui qui en avait bénificié devait vivre comme un parfait.
Parmi les parfaits était recruté le clergé cathare, dirigé
par des évêques.
La dynastie des Trencavel favorisa les hérétiques : en 1167
ils tinrent un concile à St-Félix-de-Caraman. Un évêque
hérétique venu d'Orient, y désigna les évêques
pour Carcassonne et Toulouse. Les hérétiques obtinrent des seigneurs
le droit d'avoir des cimetières spéciaux et profitèrent
de nombreux privilèges.
L'abbé de Clairvaux, chargé par le pape d'enquêter
dans le Midi, se rendit, en 1178, sur les terres de Roger II Trencavel,
protecteur avoué des Cathares. Il le déclara traître,
hérétique et parjure, puis l'excommunia.
Mais cette sentence n'entrava pas les progrés de l'hérésie. (13)
SAINT DOMINIQUE - C'est entre Avignonet et
Carcassonne que se situèrent les foyers du catharisme parmi les plus
actifs : Mas Saintes Puelles, Castelnaudary, Laurac, Fanjeaux, Montréal.
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C'est
là aprés 11 ans de périples d'évangélisation
que Raoul Diégue et Saint Dominique échoueront
en portant courageusement la parole orthodoxe. Son miracle de Fanjeaux,
où les livres saints sortirent intacts du feu, le rendit célèbre.
Il allait pieds nus, mendiant son pain.
Sa tâche n'était pas facile, il lui arrivait qu'on lui
jette de la boue au passage et que pour se moquer de lui et de son
compagnon, on leur attache de la paille dans le dos. La mauvaise saison,
qui allait interrompre quelques semaines leurs pérégrinations,
dût les surprendre à Fanjeaux, car c'est au cours de
l'hiver 1206-1207 que Diégue et Dominique fondèrent,
au pied même du coteau de Fanjeaux, le monastére de Prouille,
qui devait être leur œuvre essentielle et devait devenir une
forteresse de la foi. (2)
A Baraigne, cette même année, Vidal
de Caumont vendit à l'abbé Auger ses droits
sur l'église Ste Marie de Baraigne, mais il ne fut pas fait
mention d'un château. |
LA CROISADE- L'hérésie continuant
de progresser, le pape décida d'employer les moyens violents et demanda
en vain au roi de France, Philippe-Auguste, d'intervenir avec une armée.
Le légat du pape, Pierre de Castelnau, ayant été
assassiné par un écuyer du comte de Toulouse, la croisade fût
prêchée.
L'armée des Croisés se forma dans le nord de la France : le
pape donnait aux Croisés les mêmes avantages que pour une expédition
en Terre Sainte : "Tous les catholiques ont la permission de poursuivre
les seigneurs excommuniés et d'occuper et de garder leurs domaines".
Dirigée par les principaux archevêques du nord de la France,
quelques chevaliers et comtes dont Simon de Montfort, la croisade armée
commenca.
Le comte de Toulouse, qui était directement menacé, accepta
pour se sauver, les conditions imposées par le pape : il fut battu
de verges publiquement dans l'église de St Gilles en juin 1209, par
le légat du pape, Milon. Il abandonna les autre seigneurs du
Midi.
L'armée des Croisés, forte de 50 000 hommes, envahit les domaines
de Raymond Roger, vicomte de Béziers et Carcassonne. Aprés
la prise de Béziers, Raymond Roger se réfugia dans la
cité de Carcassonne, avec quelques seigneurs fidèles il prépara
la résistance.
Narbonne épargnée : la ville comprenait peu d'hérétiques,
les Croisés se dirigèrent sur Carcassonne.
LA CHUTE DE CARCASSONNE - Le vicomte avait concentré
dans la Cité une nombreuse garnison, mais la foule des réfugiés
gênait la défense et surtout compliquait le ravitaillement.
Le 3 août, les Croisés enlevèrent d'assaut le bourg Saint-Michel,
et le 4 se lancèrent à l'attaque du bourg Saint-Vincent, contre
lequel ils durent entreprendre un siège en règle : machines
de guerre et mines eurent raison du rempart et les défenseurs durent
se replier dans la cité. |
Le
roi d'Aragon intervint alors auprés des Croisés: Le légat
du pape offrit au vicomte et à douze seigneurs de quitter la
Cité avec chevaux, armes et bagages, mais le vicomte refusa d'abandonner
sa ville et ses gens. La lutte reprit et les assauts des croisés
furent repoussés : mais il y avait dans la ville trop de bouches
à nourrir, les puits tarirent. Le vicomte demanda à négocier
: venu au camp des croisés en parlementaire, il y fut retenu
prisonnier. Les habitants eurent la vie sauve mais les hommes durent
tous quitter Carcassonne. Ils sortirent de la Cité le 15 août
1209, n'emportant que "leurs chemises et leur brayes".
Le vicomte, captif dans une tour de la Cité, mourut le 10 novembre
suivant, peut-être assassiné. On lui fit des funérailles
dignes de son rang. Des environs, les gens vinrent en foule, pleurer
celui qui s'était sacrifié pour les défendre. |
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SIMON
DE MONTFORT - Au cours de la campagne, Simon de Monfort se fit
remarquer par l'ardeur de sa foi, par sa vaillance, son habileté militaire
et ses grands succés. |
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Le
vicomté de Carcassonne et de Béziers, terres conquises,
furent offertes au duc de Bourgogne, puis au duc de Nevers : ils refusèrent, car le vicomte Raymond-Roger avait
un jeune fils, réfugié dans le comté de Foix.
Mais Simon de Montfort accepta et devint vicomte de Carcassonne.
Il poursuivit la conquête, s'emparant de Minerve où des
centaines d'hérétiques se jetèrent dans le feu
plutôt que de capituler, prenant le château de Termes
dans les Corbières.
En 1211 Alzonne et Montréal furent enlevés et Simon s'attaqua aux quatre châteaux du Cabardés déjà
investis, sans succés, l'année précédente.
Le seigneur Pierre de Cabaret traita avec le chef des Croisés,
livra ses châteaux et reçu ailleurs de nouvelles terres.
Simon de Montfort se porta alors vers le Lauragais. Le comte
de Toulouse essaya, avec l'aide du comte de Foix, de l'arrêter,
mais ils subirent, près de Castelnaudary, une défaite
complète.(13) |
LE BUCHER DES CASSES - A ce moment là,
Baraigne, Les Cassés appartenaient au castrum de Montgiscard,
qui offrait un solide point d'appui aux hérétiques. Les Roqueville seigneurs de ce castrum, leur étaient complètement
favorables.(3) Aux
Cassés vivaient Alazaïs de Roqueville, parfaite,
son fils Raymond chevalier et seigneur du lieu et Raymonde son épouse qui sera plus tard arrêtée et brûlée
en 1245.
En ce printemps 1211 Simon de Montfort s'était replié
sur Toulouse, en compagnie de plusieurs chevaliers fidèles.
Alors commenca une extraordinaire chevauchée d'un mois qui devait
conduire les croisés Aux Cassés et à Montferrand.
Montfort assiégea Les Cassés qui capitula au bout de peu
de temps. Les religieux de l'armée croisée tentèrent
de convertir parfaits et parfaites, mais ce fût en vain. Alors
on dressa un bûcher, où l'on y jeta quelque soixante hérétiques.
Les chevaliers eurent la vie sauve, mais leur mère Alazaïs disparut sans qu'il fût possible de prouver que ce fût dans
le bûcher. (2) |
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Plus loin à Montferrand, la place forte défendue par Beaudouin,
frère du comte de Toulouse et 14 chevaliers résista aux 14000
hommes de Montfort. Mais Baudouin se rendit après avoir négocié
sa récompense.
Montferrand neutralisé, Montfort se dirigea vers Avignonet qui
capitula après quelques jours de siége. Les Avignonétains
avaient trop attendu l'aide du comte de Toulouse et craignaient la vengeance
des Croisés.(1)
En novembre 1212 les statuts de Pamiers fixèrent les
nouvelles lois et Simon de Montfort établit un sénéchal
à Carcassonne.
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En 1213, le roi Pierre d'Aragon voulut sauver ce qui restait de ses
anciennes seigneuries du Midi. Il passa les Pyrennées à la tête
d'une forte armée, et, appuyé par le comte de Toulouse et le
comte de Foix, livra bataille à Simon de Montfort, le 12 septembre
1213 à Muret. Ce fut un triomphe complet pour les Croisés. Le
roi d'Aragon fut tué et ses troupes subirent des pertes considérables.
Simon de Montfort devint comte de Toulouse, duc de Narbonne, dont Arnaud
Almaric fut archevêque. Entre les deux hommes éclata une
si vive rivalité que l'archevêque excommunia le comte.
Partout
la conquête avait eu les plus graves conséquences pour
les populations : villes prises, commerce ruiné, dynasties
seigneuriales anéanties ou exilées : les conquérants
introduisaient leur langue et leurs coutumes, installant partout des
français du nord pour surveiller les vaincus.
Cependant sa domination n'était pas solidement établie.
Toulouse se révolta et le 26 juin 1218, Simon de Montfort qui assiégeait la ville, fut tué d'une pierre qui "alla
tout droit où il fallait et frappa si juste le comte de
Montfort sur le heaume d'acier, qu'elle lui mit en morceaux les
yeux, la cervelle, les dents, le front et le comte tomba à
terre sanglant et noir". (Chanson de la croisade)
Son fils Amaury voulu venger la mort de son père et
continua le siège. Il tenta par deux fois de mettre le feu
à la ville, mais après un mois d'inutiles efforts, il
s'éloigna emportant le corps embaumé de son père. Le
corps de Simon de Montfort fut d'abord enseveli dans la cathédrale
de Carcassonne, puis fut ensuite transféré dans le monastère
des Hautes-Bruyères, proche de Montfort-l'Amaury, berceau de
la famille.(14)
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GARSENDE DEL MAS - Au Mas Stes Puelles vivait
la famille des seigneurs " de Manso" en latin, "del Mas"
en occitan, (dont nous pourrions faire aujourd'hui Delmas). L'aïeule
se nommait Garsende. Elle était la mère des chevaliers Bernard, Gaillard, Jourdain, Guillaume et Aribert,
qui se partageaient la seigneurie du Mas.
Quelques années avant la croisade, elle ouvrit une hospitalité
hérétique, en compagnie de l'une de ses filles, Gaillarde,
parfaite comme elle.
Elle surveilla de près la religion de la famille, et surtout l'éducation
des enfants, recevant son petit-fils Bertrand de Quiders, âge
de cinq ans, ou sa nièce la petite Géraude, à
qui elle apprit à adorer les parfaits.
Garsende et Gaillarde vécurent ensemble jusqu'à
leur mort, quittant de temps en temps le Mas pour rendre visite à tel
ou tel membre de leur famille, comme Géraude, qui avait épousé Estieu de Roqueville, et qu'elles allérent voir à Baraigne
vers 1215.
Vers 1225, Estieu de Roqueville conduisit les deux femmes à
Caillabel, près de Baraigne. Elles y restèrent quinze jours,
puis de là partirent pour Montségur, où Aribert vint leur rendre visite.
Leur retraite n'en fut pas pour autant définitive : les frères Bernard et Guillaume, avec le concours du prieur du Mas, les
arrachèrent à l'hérésie (c'est du moins ce que Bernard lui-même déclara plus tard aux inquisiteurs).
"Mais elles y retournèrent et furent brûlées". (2) |
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BERNARD
DE MAYREVILLE - Diacre de Baraigne
Né à la Force de Mayreville, à mi-chemin entre Castelnaudary
et Belpech, Bernard de Mayreville chevalier diacre s'installa en 1225
au Mas Stes Puelles.
Il déployat une inlassable activité prédicante sur les
villages de Laurac, Fanjeaux et Gaja vers le sud et de Baraigne à St
Michel de Lanes vers l'ouest.
Il retourna fréquemment à Mayreville voir ses frères.
Sa mission fut de visiter sans cesse les communautés souvent réduites
à deux ou trois parfaits qui se terraient dans les bois ou se cachaient
dans la cave ou le grenier d'un croyant.
En 1237, il s'installa à Montségur où il avait sa "maison".
Il y reçut la visite de Bernard de Roqueville.
Il y ordonna parfait un nouveau venu Guillaume Carriére.
Il redescendit fréquemment du "pog" pour continuer de visiter
son diaconé du Mas Stes Puelles.En 1242, à l'époque du meurtre des Inquisiteurs, il était
à Avignonet. Peu après prés de Montmaur, il achèta
à Bertrand de Quiders un livre qui avait appartenu aux Inquisiteurs.
On perd sa trace vers 1244-45, sans que l'on sache quel fût son sort .(2)
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L'INQUISITION - En Avril 1233, aprés la mort de Saint Dominique, le
pape Grégoire IX institua les tribunaux de l'Inquisition.
Les juges, habituellement choisis parmi les Dominicains, suivaient des
règlements empruntés à l'ancien droit pénal
romain. Cette procédure très rigoureuse, empêchait
l'accusé de se faire défendre par un avocat, il n'entendait
pas les témoins déposant contre lui et pouvait être
soumis à la torture, mais la condamnation n'était prononcée
que si le tribunal obtenait les aveux de l'accusé.
Les acquittements étaient assez nombreux. Beaucoup de sentences
entraînaient des peines légères : rétraction
publique, visites d'églises, pèlerinages. L'emprisonnement
ou emmurement, la confiscation totale des biens, la condamnation à
mort (accusé remis à la justice laïque) furent, en
général, assez rares, si l'on tient compte du grand nombre
de procés.
Quelques inquisiteurs oublieux des instructions du pape, en firent un
usage excessif. Les tribunaux de Carcassonne et de Narbonne avaient
un renom justifié de sévérité. |
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LA REVOLTE - Au courant de cette situation, l'héritier
des vicomtes de Carcassonne tenta en 1240 un coup d'audace. Il était
alors agé de 33 ans, et reparut brusquement à la tête
d'une petite troupe de "faidits". Le 8 septembre 1240, Trencavel entra dans les bourgs de Carcassonne dont les bourgeois lui ouvrirent les
portes. Trente trois prêtres y furent massacrés. Le vicomte commença
l'attaque de la Cité que défendit avec succés le sénéchal, Guillaume des Ormes. Malgré de violents assauts, Trencavel ne put enlever la place et l'arrivée d'une armée française
de secours l'obligea à lever le siége le 8 octobre. La soumission
de la région se fit rapidement : Trencavel passa en Aragon.
D'autres seigneurs résistérent jusqu'à la mort et plusieurs
dizaines de chevaliers, pris au château de Buc, furent pendus.
Mais les habitants supportèrent les lourdes conséquences de
l'échec de la révolte : la ville de Montolieu fut rasée,
les bourgs de Carcassonne aussi et tous les habitants expulsés. L'Inquisition
redoubla de zèle et les fonctionnaires royaux se livrèrent à
toutes sortes d'excés.
Les atroces
supplices révoltèrent les populations. De nombreuses plaintes
parvinrent au Vatican, le pape suspendit l'exercice du Saint Office à
Toulouse jusqu'en 1241.
A sa mort en Août 1241, les Inquisiteurs redoublèrent leurs violences.
Le nouveau pape eut l'accord du roi pour anéantir sous prétexte
religieux cette religion cathare. Il y avait trop longtemps que sa survie
continuait, il fallait trouver une cause pour provoquer une guerre totale.
Il suffisait de laisser les Inquisiteurs s'installer dans les bourgs fidèles
au comte de Toulouse. Avignonet était l'endroit idéal. (1) |
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LE MASSACRE DES INQUISITEURS - A la fin du mois
de Mai 1242, les Inquisiteurs quittèrent Soréze dans le Tarn,
pour Avignonet où ils arrivèrent juste avant l'Ascension.
Pendant ce temps, deux chevaliers, Guilhem et Pierre Raimon de Planha (Plaigne) descendirent de la forteresse de Montségur. A Bram, ils rencontrent Jordanet du Mas Saintes Puelles qui leur parla d'une entrevue que souhaitait
avoir avec eux Raimon d'Alfaro.Raimon d'Alfaro,
viguier, du comte de Toulouse, Raimon VII, avait le poste de bailli au château d'Avignonet.
Dans la foret d'Antioche près du Mas, le bailli insista pour faire
jurer Guilhem (cathare, sa religion lui interdisait de jurer). Il devait
porter des lettres cachetées du sceau comtal à Pierre Roger
de Mirepoix, capitaine à Montségur, et garder le secret.
Raimon d'Alfaro exposa à Guilhem de Planha le contenu
des missives. En récompense il aurait le meilleur cheval saisi après
le massacre, (ce qui fut fait).
En grande hâte il arriva à Montségur, fléchissant
un genou, il remit les lettres à Pierre Roger. Après
les avoir lues, il dit : "Préparez-vous ! Il s'agit d'une affaire
importante qui vous rapportera un grand profit.". Après une soirée
de fiévreux préparatifs, à l'aube, une troupe d'une soixantaine
d'hommes dont 15 chevaliers quitta le pog de Montségur commandée
par Pierre Roger de Mirepoix.
Elle passa à Montferrier, Villeneuve d'Olmes, Lavelanet et probablement
Mirepoix. A la halte de Gaja-la Selve la troupe se restaura et les chevaux
furent soignés. Un autre groupe les rejoignit commandé par Pierre
de Mazerolles et Jordans Vilar. Il y avait plusieurs sergents d'armes
et deux arbalétriers. A Gaja et le long du parcours d'autres hommes
augmentèrent le nombre des conjurés.
Probablement à Payra sur l'Hers, au château d'Antioche la troupe
se scinda en quatre pour mieux assurer sa sécurité, une partie
attendit entre Castelnaudary et St Martin Lalande pour couper la route aux
Inquisiteurs, une autre dans les terres incultes au-dessus du Mas St Puelles,
une autre enfin se posta à l'Ouest d'Avignonet.
Guilhem de Plana épuisé attendit avec Pierre Roger
de Mirepoix, ainsi que d'autres hommes, on ne sait pas exactement où,
à Payra ? Le château d'Antioche, se trouvait-il à Payra
ou près du Mas Saintes-Puelles ?
Le corps expéditionnaire repartit. Plusieurs vagues d'assaillants devaient
se suivre au cas où il y aurait eu un contretemps.
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Mai 1242, à Baraigne, qui était complètement acquis aux
hérétiques, les troupes se rejoignirent à l'abri du vallon.
A Marvail, se fit la liaison entre les assaillants et Guilhem Raimon Golairan et Bertrand de Quiriés, habitants d'Avignonet (Au Mas Saintes
Puelles une ferme porte encore le nom de "Quiriés").
Le groupe d'attaquants se composait de douze hommes en armes. Le commandement
était assuré par trois chevaliers faidits (chevaliers hors-la-loi
à qui le château et les terres avaient été confisqués
par l'Inquisition). Ils s'appelaient Balaguier, Bernard de Saint-Martin et Guilhaume de la Hille.
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Golayran et Quiriés leur firent traverser la plaine et
leur demandèrent d'attendre dans l'abattoir, situé à
une portée d'arbalète de la ville.
Guilhem Raimon Golayran, chevalier d'Avignonet, avait pris en main
l'organisation sur place du complot. Sa présence fut signalée
plusieurs fois à Montségur. Avec une vingtaine d'hommes, il
retourna à l'abattoir après s'être assuré que les
inquisiteurs dormaient. En pleine nuit noire toute la troupe rentra dans le
bourg fortifié. Le dernier arrêt se fit devant chez Golayran d'où sortirent des hommes avec des torches.
Le spectacle était hallucinant. Sur les murs dansaient des ombres.
Au dessus des têtes d'hommes en armes, les flammes des torches se reflétaient
sur les lames des haches fraîchement aiguisées. Seuls des cliquetis
métalliques troublaient le silence pesant.
Raimon d'Alfaro, vêtu d'un pourpoint blanc les attendait à
l'entrée du château. Bernard de Na Vidai ouvrit les portes.
Un écuyer les conduisit jusqu'à la pièce où dormaient
les Inquisiteurs.
La tension montait au passage de chaque porte ouverte. Quand les conjurés
virent le grand rideau derrière lequel dormaient les inquisiteurs,
ils s'y précipitèrent dessus si rapidement que les religieux
n'eurent le temps que d'entonner un cantique (le Te Deum ?).
Les haches, les lances, les couteaux s'abattirent sur eux. Guilhaume Arnaud eut la langue percée par un couteau, elle représentait trop
de malheurs.
La vengeance exécutée, commença la saisie du butin mais
il était maigre : livres, chandeliers, une boite de gingembre, quelques
pièces d'argent, des vêtements, des scapulaires et des couteaux.
Les cris de joie effacèrent la déception, et plus tard les esprits
dérivèrent en histoires les plus fantasmagoriques.
Quand tout fut "fini et bien fini" les Avignonétains accompagnèrent
les conjurés de Montségur et de Gaja hors de la ville. Impatient Pierre Roger de Mirepoix attendait ses hommes. |
Quand le commando le
retrouva il se plaignit qu'on ne lui apporta pas le crâne de Guilhaume
Arnaud. Il voulait en faire une coupe cerclée d'or, mais on lui
dit qu'il avait été brisé.
De retour dans Avignonet, Raimon d'Alfaro et ses complices appelèrent
aux armes.
La nouvelle se répandit vite dans tout le Languedoc, et l'espoir d'une
vie meilleure naissait. |
L'APRES
MASSACRE - Les corps des inquisiteurs furent transportés
et enterrés à Toulouse par les moines de leur ordre.
Le jour de l'ascension de 1242, les meurtriers des inquisiteurs furent accueillis
en héros à Saint Félix de Toumegat dans la vallée
de l'Hers, à l'est de Pamiers. Même le curé se réjouira
avec ses ouailles.
Les meurtriers avignonétains se dispersèrent parfois très
loin. Raimon d'Alfaro se serait réfugié au nord de l'Italie,
et Bertrand de Quiriès, plus précisément, en Lombardie.
Raimond VII, probable instigateur du massacre, fut excommunié
par les nouveaux chefs de l'inquisition, puis gracié en 1243, par le
nouveau pape Innocent IV. Il fut obligé d'aider l'Inquisition
qui redoubla de violence. En peu de temps le pape et le roi surent que les
assassins étaient descendus de Montségur.
Les représailles furent terribles, Baraigne n'y échappa pas.
Les troupes de l'Inquisition visitèrent le village, tous les cadavres
présumés cathares furent exhumés du cimetière
et brûlés sur un bûcher dressé sur le terre-plein
derrière l'église devant le cimetière. Tous les "suspects"
portèrent la croix d'infamie.
En avril 1243 les évêques réunis à Béziers
décidèrent d'attaquer Montségur. La forteresse "symbole"
fut prise au printemps 1244 après un long siège. (1) |
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Ce
fut un des grands mérites de Louis IX d'avoir compris que cette
malheureuse région audoise ne pourrait jamais devenir française
de coeur si des procédés aussi odieux continuaient : il envoya
des enquêteurs qui réprimèrent les abus et le pape demanda
aux Inquisiteurs d'être moins cruels et moins injustes. Par les ordonnances
de 1254 et 1259, Louis IX fit restituer de nombreux biens aux descendants
des anciens hérétiques.
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En 1247, il avait autorisé les habitants de Carcassonne à reconstruire
leur bourg, mais pour donner à la Cité toute sa valeur militaire,
il ne voulut plus d'agglomération prés des remparts. Des commissaires
royaux fixèrent l'emplacement de la nouvelle ville sur la rive gauche
de l'Aude. Les rues perpendiculaires tirées au cordeau, la place centrale,
étaient conçues sur le plan d'une grande bastide.
Louis IX voulut aussi en finir avec les prétentions des rois
d'Aragon sur la région Languedocienne : il y parvint par le Traité
de Corbeil en 1258.
En 1271 Gautier de Varagne, chevalier, était présent
lors de la prestation de serment au roi par les consuls de Carcassonne.
En 1272 et 1282, son frère Gaufrid fut élu membre à
l'assemblée de la noblesse de la Sénéchaussée,
et en 1287, il fut élu gouverneur de Carcassonne.
Louis IX fit aussi entreprendre un énorme travail de transformation
de la Cité que son fils Philippe le Hardi continua.
Une garnison permanente de sergents d'armes à la solde du roi était
sous les ordres directs du sénéchal. Chaque nuit veillait 40
hommes d'armes et de nombreuses rondes vérifiaient les postes de garde.
A l'époque de Philippe III, la Cité servit souvent de
séjour à la Cour. En 1283 il y tint même un parlement.(13)En 1318, le diocèse de Saint Papoul fut crée par le pape Jean
XXII. Le nouveau diocèse comprenait, quarante quatre paroisses
dont Baraigne, Caillavel de Belflou et huit annexes.
Ce diocèse fut crée par bulle pontificale du 22 février
1318, il subsista jusqu'à la Révolution. (4)
Baraigne dépendait du Baillage d'Avignonet. (1)
Peu
à peu les âpres luttes du passé s'apaisaient. Les générations
nouvelles oubliaient les sentiments de haine qui avaient longtemps dominé.
L'ancienne noblesse était totalement éteinte. Au contraire de
nombreux fonctionnaires royaux avaient fait souche dans le pays et formaient
des troupes fidèles aux traditions françaises et au roi. Leur
influence gagnait dans la population.
Le catholicisme était aussi vainqueur dans cette lutte d'un siècle.
Cependant, la langue d'oc, ou plutôt l'occitan, ne fut pas abandonnée.
Les paysans continuèrent à la considérer comme la langue
maternelle. Les poètes s'en servirent encore, mais après le
XIVe siècle les troubadours disparurent.
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1348 -
1376 : La Peste Noire - La Guerre de Cent ans |
La Peste noire - En 1329 un navire venu de Crimée apporta la peste noire, la maladie
qui allait décimer un tiers de la population européenne.
"De vives douleurs se faisaient sentir à la poitrine, des crachats
sanglants étaient rendus et l'haleine était d'une horrible fétidité.
La gorge et la langue, brûlées par la chaleur excessive, étaient
noires et teintées de sang... Souvent de vastes abcès se formaient
sur les cuisses et sur les bras." (Cantacugène Jean Duché
Histoire du Monde 1960).
La contagion fut terrible. Elle atteignit le Lauragais en 1348.
La région perdit la moitié de sa population.
La Guerre
de Cent ans - Sous l'unité spirituelle et avec une civilisation
médiévale épanouie, commerce et agriculture furent en
plein essor. C'était la paix.
Mais le premier acte de la "tragédie franco anglaise" commenca.
Les Anglais attaquèrent le Languedoc en 1355.
" Ce ne fut pas, à proprement parler une expédition militaire,
dit un historien, mais plutôt une invasion de paysans en armes, peu
d'anglais mais des bordelais, des basques et des landais ".
Le Prince Noir, fils d'Edouard III prince de Galles, ayant débarqué
en Gascogne fin juillet 1355, réunit à Bordeaux 1500 lances,
11000 archers, et 3000 soldats de troupes légères.
Il se mit en mouvement en octobre. De Bordeaux, il gagna le Lauragais par
la vallée de la Garonne, pilla les environs de Toulouse qu'il contourna,
brûla Castanet, Baziège, Montgiscard, Villefranche de Lauragais,
Avignonet, le Mas Saintes Puelles le 31 octobre.
" Il arriva devant Castelnaudary, une bonne grosse ville et bon château
et remplie de gens et de biens. Mais elle n'était pas fermée,
ni le château non plus, si ce n'est de murs de terre selon l'usage du
pays. Les Anglais l'environnèrent, l'assaillirent, et la prirent. Et
il y eut un grand massacre d'hommes et la ville fut toute courue, saccagée,
pillée et tout le bon avoir pris et levé. Le prince et ses gens
se reposèrent là une demi-journée et une nuit, et le
lendemain ils continuérent vers Carcassonne ". (Chroniques
de Froissart)
Aprés avoir brûlé Fanjeaux, la chevauchée du Prince
Noir s'arrêta devant la Cité de Carcassonne défendue
par le comte Aymeric. Ils s'emparèrent de Limoux qu'ils pillèrent
et brûlèrent, revinrent à Carcassonne où le bourg
devint la proie des flammes, et anéantirent Montréal avant de
reprendre le chemin de Bordeaux.
Les récoltes furent brûlées, les vignes et les arbres
fruitiers coupés.
En 1373, aux ravages de la peste vint s'ajouter la disette. La récolte
de blé fut très mauvaise. (1) |

Edition :
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